Hopelessness - Pv Roxane

Il suffit d'une rencontre pour que votre vie bascule. Malicia venait précisement de faire la rencontre qui allait changer sa petite vie tranquille. Mais ça, elle l'ignorait encore. Pour l'heure, elle était ivre et heureuse. Elle ignorait totalement que lorsqu'elle ouvrirait les yeux le lendemain matin, sa vie serait totalement bouleversée et qu'elle garderait de cette nuit des cicatrices extrêmement douloureuses. Pas de celles qui se voient. Le genre de cicatrices qui font que le sourire que vous affichez n'est qu'un mensonge, celles qui vous font que vous vous réveillez en hurlant au beau milieu de votre sommeil.

Malicia avait passé la soirée et une bonne partie de la nuit avec Roxane. Elle était tellement heureuse de s'être fait une nouvelle amie aussi vite. Et elle avait bu. Bu, encore et encore, au point de ne plus pouvoir compter les verres. C'est donc ivre morte qu'elle enfonça tant bien que mal la clé dans la serrure de son appartement. Elle dû s'y reprendre à plusieurs fois, mais finalement, la porte finit par céder, déséquilibrant Malicia qui tomba à genoux sur la moquette de l'entrée. Elle essaya bien de se relever, mais son corps refusait de lui obéir. Par dépit, elle finit par ramper plus avant dans son appartement et donna un coup de pied à la porte pour qu'elle se referme.

Malicia resta un long moment étendu sur le sol, riant parfois toute seule, en se disant que si la pièce cessait de tanguer l'espace d'un instant, peut-être qu'elle pourrait se remettre sur ses pieds... Ce ne fut que lorsque son estomac se contracta douloureusement qu'elle parvint à se mettre à quatre patte pour rejoindre la salle de bain le plus rapidement possible. Malheureusement pour elle et pour le carrelage immaculé, elle ne parvint pas assez vite à destination et la nausée qui la submergeait lui fit lacher prise à seulement quelques centimètres de la cuvette des toilettes.

Malicia se laissa choir sur le carrelage. La fraicheur de celui-ci l'aida à se sentir mieux. Lorsqu'elle fut certaine de ne plus vomir, elle fit une nouvelle tentative pour se remettre debout. Tentative qui fut fructueuse. Elle parvint à rejoindre sa chambre à grand renfort de maladresse avant de se laisser tomber sur son lit pour plonger dans un sommeil sans rêves.

Petit à petit, Malicia refit surface, sa conscience revenant par brumes, de très loin. Au début, ça n'était qu'un changement de respiration. Des paupières qui battent. Une main qui frotte dans les cheveux. Puis l'impression que cette forte lumière en disait long sur l'heure avancée de la journée. Sans pour autant parvenir à sortir des limbes. Une douleur atroce qui commençait à envahir son crâne. Enfin, elle ouvrit les yeux. Son regard se posa sur le plafond de sa chambre mais ses yeux mirent un moment avant de faire le point. Lentement, très lentement, Malicia repoussa les draps dans lesquels elle était entortillée.

Par le plus grand des miracles, elle parvint à se sortir du lit qui criait son nom et elle se dirigea vers la salle de bain d'un pas de zombie. Dans cette pièce, elle le savait, elle trouverait le remède à ce monstre qui lui déchirait le cerveau. Au passage, elle remarqua qu'elle était habillée. Avait-elle été ivre à ce point ? Puisqu'elle n'arrivait pas à se souvenir des évènements de la nuit, la réponse était sûrement oui. A la vue de la flaque de vomi sur le sol, elle grimaça et tourna la tête. Enfin, le sésame se présenta à elle. Malicia fit tomber deux cachets d'aspirine au creux de sa main. Alors qu'elle allait la porter à sa bouche, son geste se suspendit brusquement.

Ses mains étaient recouvertes de sang séché. Malicia laissa tomber l'aspirine au sol et se précipita devant son miroir pour déterminer où elle s'était blessée. Elle découvrit d'autres traces de sang sur son visage, son cou, ses vêtements. Même ses cheveux en étaient poisseux. Pourtant, elle n'avait mal nulle part, mis à part sa migraine, et ne semblait pas avoir de plaie. Elle finit par se déshabiller complètement et comtempla son reflet sous toutes les coutures, sans trouver une seule blessure sur son corps.

Comment pouvait-on avoir autant de sang sur le corps sans présenter l'ombre d'une petite coupure. Malicia entra dans la douche pour se débarasser de tout ce sang. Pendant que l'eau rosissait à vue d'oeil, elle tenta de se souvenir d'une quelconque chute qui pourrait expliquer son état. Mais sa mémoire semblait avoir été effacée. Elle se souvenait avoir quitté son travail en compagnie de Roxane, être allée boire un verre avec elle... Avoir enchainé les verres... Puis c'était le trou noir. Qu'avait-elle bien pu faire après ? Aucune bribe d'image ne se présentait à elle.

Malicia finit par couper l'eau et s'enrouler dans une grande serviette moelleuse. Se posant encore de nombreuses questions sur la présence du sang, elle ramassa l'aspirine, le jeta, en pris deux nouveaux qu'elle avala cette fois, et entreprit de nettoyer les vestiges de sa beuverie. Elle ouvrit un placard d'où elle sortit une serpillère et versa sur le sol une grande dose de javel. Une fois son oeuvre de propreté achevé, elle pris le chemin de la cuisine. Peut-être qu'un café l'aiderait à remettre de l'ordre dans ses idées, peut-être allait-elle retrouver la mémoire.

L'esprit encore embrumé, elle se cogna les hanches sur le bord du bar. Le cri de douleur qu'elle allait pousser resta bloqué dans sa gorge. Ses yeux s'arrondirent, son rythme cardiaque augmenta sensiblement, ses mains tremblantes lâchèrent sa serviette qui se détacha de son corps pour s'échouer sur le sol. Un homme était allongé derrière le bar. Pire encore, un liquide épais et foncé s'était échappé de sous son corps. Malicia sentit la panique la gagner, elle était tétanissée.

Puis tout s'accélera. Malicia se jeta au côté de l'homme et entreprit de le secouer en hurlant. Malgré tous ses efforts, il ne semblait pas revenir à lui. Malicia tenta de prendre de grandes inspirations.

* Respire Malicia, respire.... Souviens-toi de ce que tu as appris... Ces foutus cours de sauvetage vont enfin te servir.*

Fébrilement, Malicia glissa ses doigts sur la gorge de l'homme. Au contact de sa peau glaciale, elle frémit. Elle avait beau chercher, elle ne trouvait aucun pouls. Peut-être s'y prenait-elle mal. La panique l'empêchait de réfléchir correctement. Elle finit par poser sa tête sur la poitrine de l'homme. Aucun battement de coeur, aucune respiration. Il était si froid. Alors l'évidence frappa Malicia de plein fouet. Cet homme était mort. Elle se mit à pousser de petits sanglots hystérique et se releva. Elle couru en direction du téléphone et décrocha le combiné. Mais alors qu'elle allait composer le numéro de la police, une révélation soudaine la transie de terreur.

Un homme baignait dans son propre sang au milieu de sa cuisine. ELLE s'était réveillée couverte de sang. Avait-elle pu ? Non, bien sûr que non ! Elle n'était pas une meurtrière !!! Jamais elle n'aurait abattu un inconnu dans son appartement. Qui était-il d'ailleurs ? Non, c'était impossible. Et poutant... Tout ce sang... Malicia reposa le téléphone et attrapa sa tête entre ses mains. Etait-elle devenue folle ? Ca n'était peut-être qu'un cauchemar... Dans une seconde elle allait se réveiller en sursaut et s'apercevoir que rien de cela n'était vrai.

Malheureusement pour elle, elle était bel et bien éveillé et un cadavre gisait sous ses yeux. Et vraisemblablement, il était dans cet état de fait par sa faute. Qu'allait-elle faire ? Se dénoncer à la police ? Et après qu'allait-elle leur raconter ? Elle était bien incapable de se souvenir de ce qu'elle avait fait la veille, comment allait-elle expliquer son geste ?

Malicia se laissa tomber sur le sol et se mit à sangloter longuement. Elle n'était pas une meurtrière... Jamais elle n'aurait commis un tel acte. Ca n'était pas possible ! CA N'ETAIT PAS POSSIBLE !!! La panique céda la place à la colère. Malicia n'avait aucun souvenir de ce qui s'était passé, mais elle savait une chose : si elle avait réellement tué cet homme, c'était qu'elle n'avait pas eu le choix. Peut-être que cet homme l'avait suivi chez elle, peut-être qu'il lui avait voulu du mal et qu'elle avait dû se défendre. Oui c'était la seule explication. Elle s'était défendue. Elle en était convaincue.

Si elle prévenait la police, elle allait finir en prison, certes avec une peine allégée si elle réussissait à prouver qu'il s'agissait de légitime défense, mais en prison quand même. Il en était hors de question. Elle n'allait pas laisser cet inconnu lui pourrir la vie. Lentement, elle releva la tête et sécha ses larmes. Une évidence s'imposait à elle : il fallait qu'elle se débarasse du corps. A cette idée, la panique la gagna à nouveau. Comment allait-elle faire ça ? Pouvait-elle faire ça ? Elle avait quand même tué un être humain, pourrait-elle à nouveau se regarder en face après ça ? Ne valait-il mieux pas se rendre finalement ?

En proie aux doutes, Malicia hésitait sur la marche à suivre. Elle avait besoin d'aide. Mais à qui pouvait-elle s'adresser ? La seule personne qu'elle connaissait ici était Roxane. Devait-elle appeler Roxane ? Ce n'était peut-être pas une si mauvaise idée après tout... Peut-être que son amie n'avait pas été aussi ivre qu'elle, peut-être pourrait-elle l'aider dans sa quête de souvenir ?

Résolue, Malicia se leva, retourna dans la salle de bain et fouilla ses poches à la recherche de son portable. Elle l'avait. Elle fouilla frénétiquement son répertoire, espérant de tout son coeur avoir enregistré le numéro de la jeune femme au cours de cette soirée alcoolisée. Enfin, la chance lui souriait. Elle pressa un bouton et porta l'appareil à son oreille. Roxane décrocha et le son de sa voix empli Malicia d'un soulagement infini.

- Roxane ? C'est... C'est Malicia... Désolée si je te dérange... Je... Je ne sais pas si j'ai le droit de te demander ça... Mais... J'ai besoin de ton aide.