La solitude. Douce mère. Dont les bras chauds, gelaient pourtant le corps. Dont le souffle tendre, brisait malgré tout le cœur. Petite vermine amère. Asphalte de guerre. Omniprésente. Dans l’âme des enfants. Dans l’esprit des parents. Et, elle était là. Divaguant entre les cerveaux liquides. Entre les enveloppes déjà vides. Elle enlaçait la peau. Encore et encore. Comme une étreinte éternelle et mortifère…
« Greta ? Greta !… » Une voix raisonna. Innocente. Enfantine, entre les rues peuplées d’ombres. C’était ce pas. Cette démarche hésitante, dans la clarté jaunâtre des lampadaires grésillant. Ce drapé immaculé, autour de ce visage que l’on ne devinait qu’à peine. Cette silhouette voûtée. Cassée, par un mal inconnu. « Greta ? » Le néant semblait lui répondre en un écho lent et vengeur. Sans lendemain, ni destin…
Mais elle poursuivait sa route. Sans détour, ni recours. Pauvre enfant du Malin. Pauvre petite chose, dont le cœur noircissait en vain…
« Vienne la nuit et sonne l’heure et moi, je meurs… »
Puis vint l’ennui. L’errance vive. Le ‘pourquoi’ comme ça. La course. La fuite… du temps que l’on aimerait étreindre. Que l’on… voudrait éteindre ? Que l’on voudrait…
« Greta, tu trembles… » La mort ?… C’était l’apparition subite. L’illusion d’optique. Pourtant, le liquide s’imprégnait du tissu blanc. Telle une main de velours ganté autour de la gorge pâle. Violent et décadent. « Gre… » Mais les mots moururent à ses lèvres. Petites poussières de cendre, dans cette nuit aussi sombre que l’encre. Elle fit un pas. Vacillant d’abord. Puis entêtant ensuite. Le sang semblait inonder l’autour. Vague âcre et amère, qui venait lui lécher les pieds avec avidité. Elle voulut reculer, mais elle était prise au piège de cette cage d’hémoglobine. Un son s’extirpa de son corps. Faisant trembler les murs de sa cage thoracique, jusqu’au creux de ses reins. « Mal… » Bredouilla-t-elle, tandis que la scène ne semblait vouloir s’interrompre. Résignée, elle s’agenouilla religieusement et, de ses doigts dessina à travers cette purée pourpre. « Greta, c’est la mort qui saigne comme ça, tu crois ? » Mais la dite, n’était plus là depuis longtemps. Son visage se porta alors sur ce regard reluisant derrière l’obscurité. Ce regard, d’une finesse, d’une animalité presque étouffante. « Et vous, sentez-vous la mort comme ces larmes rouges ? »…
Sa petite tête s’inclina. Animal encore inapprivoisé et intrigué. « C’est vous... C’est vous la mort… » Puis, elle passa sa main à ses lèvres, pour y dissimuler un rire sans fondement. Imprégnant sa peau légèrement rosé, d’une pellicule épaisse et rougeâtre. « C’est chaud… » Elle pouffa à nouveau. Et, dans une maladresse déconcertante, s’approcha du pauvre pantin écroulé sur le sol. « C’est chaud… » Répéta-t-elle rêveusement, alors que ses doigts trouvèrent refuge au creux de cette chaire encore brûlante. S’enfonçant toujours plus, jusqu’à ne plus sentir que la palpitation vive du cœur bientôt fatigué…
Qu'est ce qui anime un vampire si ce n'est le sang ? Rien. Car le sang, c'est la vie, c'est le moteur des démons... des créatures de la nuit. Et Alexandra n'était pas une exception. Elle avait besoin de sang pour survivre et ne s'en privait guère.
Depuis qu'elle avait de nouveau perdu son âme, la vampire chassait très souvent et le nombre de disparitions avait légèrement augmenté... On soupçonnait un serial killer... Évidemment, qui pourrait soupçonner une jeune femme ? Toutes les victimes étaient des hommes, d'une trentaine / quarantaine d'années... et tous étaient loin d'être des enfants de cœur. Car la vampire, aussi inhumaine soit-elle, choisissait ses repas avec habileté. Elle était La veuve noire, elle détruisait les hommes... elle les attirait dangereusement dans ses filets pour mieux les exterminer.
Et ce soir encore, une victime s'était inscrite à son tableau de chasse. Ryan, un homme d'environ 35 ans, brun, les yeux bruns, et aimant particulièrement les jeunes filles... les très jeunes filles. Alexandra l'avait suivi pendant quelques heures, l'ayant aperçu dans sa voiture, jumelles en main... et regardant une adolescente prendre sa douche. Quel âge avait-elle ? Sans doute 14 ou 15 ans... « Pauvre » Ryan qui se délectait grassement dans sa voiture... il n'eut pas le temps de remonter son pantalon quand Alexandra arracha la portière et l’assomma sur son volant. Il n'en aurait d'ailleurs jamais le temps.
La vampire russe l'avait ensuite emporté dans une des grottes de Sunnydale et l'avait torturé des heures durant. Mais personne ne pouvait l'entendre, personne. Son sang s'écoulait doucement des multiples plaies et fractures ouvertes délicatement offertes par la jeune femme aux cheveux violets. L'homme pleurait, la suppliait...
« Fais de beaux rêves... » lui murmura-t-elle à l'oreille en lui arrachant les parties génitales.« Ou pas... »
Il se mit à hurler si fort qu'elle lui brisa la nuque pour le faire taire. De toute façon, il n'était plus drôle et ne la divertissait plus. Elle commença donc son repas, buvant le sang de ce monstre avant qu'il ne se vide totalement. Elle prenait des forces, et elle pouvait ressentir toute la peur qu'il avait éprouvé avant de mourir battre encore dans ses veines à demi-mortes. Et elle adorait ça. Lorsqu'elle en eut marre, elle se releva doucement, essuyant la commissure de ses lèvres, et regarda « son œuvre ». Il était bien plus drôle de ne pas avoir d'âme lorsqu'on était un vampire... oui... bien plus drôle.
Soudain, la vampire se retourna brusquement, entendant une voix douce et légère. Une voix de femme... à cette heure-ci... dans une grotte ? Et en effet, elle vit arriver une rousse particulièrement jolie et... « ailleurs ». Toute personne normalement constituée serait partie en courant au moment où ses yeux seraient entrés en contact avec le corps sanglant de l'homme sur le sol... Mais pas elle. Elle continuait d'appeler quelqu'un... Greta... et ses mots moururent lorsqu'elle resta fixée sur le corps gisant. Comble de l'étrange... elle s'assit religieusement devant ce dernier, et resta là... ensanglantée. Mais Alexandra ne fit rien. Elle ne bougea pas, la regardant, décontenancée.
Puis, finalement, la rousse leva la tête vers elle et ouvrit ses grands yeux bruns vers ceux, dorés, de la vampire.
« C’est vous... C’est vous la mort… »
Ce n'était pas une question... dans sa bouche, cela sonnait comme une évidence, comme si toute vérité ne pouvait sortir qu'à travers la jolie rousse enfantine.
« C'est moi... »
Sa voix douce raisonnait dans la grotte tandis qu'elle regardait attentivement la jeune femme assise sur le sol... Quelle étrange jeune femme d'ailleurs. Elle ne semblait pas avoir peur, pire, elle semblait intriguée, intéressée... fascinée par le spectacle qui s'offrait à elle. Puis elle rit, elle rit en touchant le liquide cuivré... en s'approchant de feu-Ryan... en posant ses mains sur sa chair sanglante... oui, elle riait de façon naturelle.
Alexandra était... sous le choc ? C'était le mot. Son empathie marchait à la perfection, ne la faisait pas souffrir... et elle sentait quelque chose de fort, de puissant et d'unique émaner de la jeune femme quasiment allongée sur ce pantin désarticulé. Elle ne se sentait plus... « monstrueuse », elle était juste Alexandra, juste elle. Elle était.
Doucement, la belle russe s'accroupit près de la rousse et la regarda faire, sans rien dire. Pendant plusieurs minutes, peut-être heures, elles ne dirent rien. Ce fut néanmoins Alexandra qui brisa le silence, intriguée.
« Qui êtes-vous... Comment vous appelez-vous... Enfin je... Je... Que faites-vous ici ?... »
Ces mots, doux, étaient sortis comme un murmure dans sa bouche, comme si seule la jeune femme pouvait l'entendre. Puis, toujours intriguée, elle glissa sa main dans ses cheveux flamboyants... Elle était effectivement réelle ! Sunnydale était décidément une ville pleine de mystères et de surprises... plus agréables les unes que les autres.
Will & Me.
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Freed from desire...
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